Une des raisons pour lesquelles l’or est si précieux est sa grande inertie chimique : lorsqu’on fabrique quelque chose en or, il conserve son éclat. Même lorsqu’il peut réagir avec un autre matériau, il est à peine soluble, ce qui rend difficile sa purification par rapport aux autres matériaux. C’est en partie pour cela qu’une grande majorité de l’or que nous avons obtenu provient de gisements où il est présent sous forme de gros blocs, certains atteignant des centaines de kilogrammes.
Ceux d’entre vous qui ont prêté attention au paragraphe précédent pourraient avoir remarqué un problème : si l’or est si difficile à obtenir sous sa forme pure, comment les processus naturels créent-ils d’énormes morceaux d’or ? Lundi, un groupe de chercheurs australiens a publié une hypothèse, ainsi qu’un certain nombre de preuves pour la soutenir. Ils proposent qu’un effet piézoélectrique déclenché par un tremblement de terre électroplaque essentiellement l’or sur les cristaux de quartz.
L’hypothèse
Environ 75 % de l’or obtenu par l’humanité provient de ce que l’on appelle les gisements d’or orogéniques. L’orogénie est un terme désignant les processus tectoniques qui forment les montagnes, et les gisements d’or orogéniques se forment dans les seams où deux masses rocheuses se déplacent l’une par rapport à l’autre. Ces zones sont souvent remplies de fluides hydrothermaux chauds, et la chaleur peut augmenter la solubilité de l’or de “à peine présent” à “extrêmement faible”, généralement moins d’un milligramme par litre d’eau.
Un autre fait frappant concernant ces gisements est qu’ils sont généralement associés au minéral quartz, une forme cristalline de dioxyde de silicium. Cette productivité a formé la base de la nouvelle hypothèse, qui lie ensemble un certain nombre de sujets qui sont généralement considérés comme largement non liés.
Il s’avère que le quartz est le seul minéral abondant qui soit piézoélectrique, c’est-à-dire qu’il génère une charge lorsqu’il est soumis à une contrainte. Bien que vous n’ayez pas besoin de comprendre pourquoi c’est le cas pour suivre cette hypothèse, l’explication des chercheurs sur l’effet piézoélectrique est remarquablement claire, donc je vais simplement la citer ici pour ceux qui souhaitent apprendre quelque chose : “Le quartz est le seul minéral courant qui forme des cristaux dépourvus de centre de symétrie (non-centrosymétrique). Les cristaux non-centrosymétriques déformés sous tension présentent un déséquilibre dans leur configuration électrique interne, ce qui produit un potentiel électrique — ou tension — à travers le cristal qui est directement proportionnel à la force mécanique appliquée.”
Le quartz se trouve être un isolant, donc ce potentiel électrique ne se dissipe pas facilement tout seul. Cependant, il peut être éliminé par le transfert d’électrons vers ou depuis d’autres matériaux qui touchent les cristaux de quartz, y compris les fluides. En pratique, cela signifie que la charge peut déclencher des réactions redox (réduction/oxydation) dans les fluides à proximité, potentiellement neutralisant tous les ions dissous et les faisant sortir de la solution.
Cela a le potentiel d’être auto-renforçant. Une fois qu’un petit dépôt métallique se forme à la surface du quartz, cela facilitera l’échange d’électrons avec le fluide dans son voisinage immédiat, ce qui signifie que plus de métal sera déposé au même endroit. Cela réduira également la concentration du métal dans la solution voisine, favorisant la diffusion d’ions métalliques supplémentaires vers cet emplacement, ce qui signifie que le fluide n’a pas besoin de continuer à circuler au même endroit.
Enfin, le concept nécessite également une source de contrainte pour générer l’effet piézoélectrique en premier lieu. Mais rappelez-vous que tout cela se passe dans une zone de faille active, donc la contrainte n’est pas en manque.
Et les preuves
Déterminer si cela se produit dans des zones de faille actives serait extrêmement difficile pour toutes sortes de raisons. Mais il est relativement facile de plonger des cristaux de quartz dans une solution contenant de l’or et de voir ce qui se passe. C’est donc la voie choisie par les Australiens.
L’or était sous forme de solution d’ions chlorure d’or ou de suspension de nanoparticules d’or. Les cristaux de quartz étaient soit du quartz pur, soit provenant d’une région riche en or et contenant déjà de petits dépôts d’or. Les cristaux eux-mêmes ont été soumis à une contrainte à une fréquence similaire à celle produite par de petits tremblements de terre, et l’expérience a duré une heure.
Une heure était suffisante pour que de petits dépôts d’or se forment sur les cristaux de quartz pur, quel que soit qu’ils proviennent d’or dissous ou de nanoparticules d’or suspendues. Dans le cas du quartz formé naturellement, l’or a fini par se déposer sur les sites existants où le métal est présent, plutôt que de former des dépôts supplémentaires.
Les chercheurs notent que beaucoup de quartz dans les dépôts est désordonné, plutôt que sous forme de cristaux uniques. Dans un matériau désordonné, il y a de nombreux petits cristaux orientés au hasard, ce qui signifie que l’effet piézoélectrique de l’un de ces cristaux est généralement annulé par ceux qui l’entourent. Ainsi, l’or se formera de préférence sur des cristaux uniques, ce qui aide également à expliquer pourquoi il est trouvé en gros morceaux dans ces dépôts.
Par conséquent, il s’agit d’une hypothèse assez convaincante : elle explique quelque chose de déroutant, repose sur des processus bien établis et est soutenue par quelques expériences. Étant donné que l’activité dans les failles actives est susceptible de rester à la fois lente et inaccessible, les prochaines étapes consisteront probablement à obtenir des informations à long terme sur le taux de dépôt par ce processus et une comparaison physique de ces dépôts avec ceux trouvés dans des environnements naturels.
Nature Geoscience, 2024. DOI : 10.1038/s41561-024-01514-1 (A propos des DOI).
En tant que journaliste de LesNews, je trouve cette hypothèse fascinante. Les implications de ces recherches sur la formation de l’or pourraient changer notre compréhension des gisements minéraux, mais elles soulèvent également des questions sur les moteurs géologiques des tremblements de terre, et comment ces mouvements saisissants interagissent avec le monde minéral. Cela me rappelle l’interaction complexe entre la tectonique des plaques et les ressources naturelles sur lesquelles nous reposons.