Le travail des journalistes et des médias est de plus en plus influencé par la technologie de l’intelligence artificielle générative, apportant à la fois des possibilités et des inquiétudes.

La majorité de l’industrie médiatique en Amérique Latine ne cache pas les défis que pose l’adaptation à ces changements rapides, liés à l’émergence de l’IA générative, selon la Société Interaméricaine de Presse (SIP).

Pour l’année 2024, cet organisme a proposé d’ouvrir des espaces de formation tout au long de l’année afin d’aborder les enjeux que présente cette technologie, devenue un sujet central dans le journalisme.

En prévision de 2025, la SIP anticipe une adoption exponentielle de l’IA, s’engageant à approfondir son analyse sur cette thématique.

Le chercheur Anthony Pereria, de l’Université Internationale de Floride (FIU), dont le laboratoire de recherche collabore avec la SIP sur les questions liées à l’IA générative, souligne l’importance d’enrichir le débat autour des questions ouvertes que soulève cette technologie dans le domaine médiatique.

Il estime qu’il est crucial de discuter ouvertement de l’obligation pour les médias d’identifier les contenus générés par l’intelligence artificielle et de la manière dont cela pourrait influencer l’opinion des lecteurs.

Qu’est-ce que l’intelligence artificielle générative et comment fonctionne-t-elle ?

L’Intelligence Artificielle Générative (IAG) est une branche de l’intelligence artificielle axée sur la création de contenu originel à partir de données préexistantes. Grâce à des algorithmes et réseaux de neurones sophistiqués, cette technologie apprend à partir de textes et d’images, produisant ainsi du contenu nouveau et unique. Les avancées réalisées dans ce domaine ces dernières années sont significatives et promettent des améliorations futures. Cette technologie repose sur l’apprentissage automatique à partir de contenus disponibles sur Internet.

Au cours de cette année, l’IA a accru sa capacité à rédiger des textes de manière autonome, à créer des images, à produire des narrations audiovisuelles, et même à segmenter les messages pour diverses audiences. Dans le pire des cas, elle peut aussi être exploitée pour manipuler des informations et désinformer.

Années décisives

Le journaliste argentin Álvaro Liuzzi, spécialiste en communication numérique, soutient que les médias en Amérique Latine se trouvent à un tournant pour tirer parti des avantages de l’intelligence artificielle, à condition de la considérer comme une alliée.

Lors d’un débat organisé par la SIP pour anticiper les évolutions de l’IA en 2025, Liuzzi a affirmé que l’année écoulée a confirmé la place incontournable de l’IA dans le traitement de l’information.

“Nous pourrions considérer que 2022 et 2023 ont été les années où de nombreux confrères ont pris conscience des potentialités et des défis de l’intelligence artificielle, alors que 2024 et 2025 seront les années où les médias adopteront une approche plus réfléchie et stratégique vis-à-vis de l’IA dans leurs activités,” a-t-il précisé.

Un sujet délicat

Début 2024, l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a élaboré un document de travail sur le thème “Journalisme et intelligence artificielle en Amérique Latine”, en réponse à la “croissance exponentielle de l’IA” et son impact sur les domaines social, économique, culturel, environnemental et politique de la région, en tant que “point de vue critique et éthique” sur cette technologie en pleine expansion.

Pour l’UNESCO, il est essentiel que les journalistes maintiennent des “normes de qualité strictes face à l’IA”, car cette technologie pourrait brouiller les frontières avec le marketing et la science-fiction. Il est donc impératif d’“appliquer des principes éthiques” dans le journalisme.

De plus, l’agence de l’ONU prévoit d’examiner l’utilisation de l’IA dans les rédactions de médias en Amérique Latine, en s’appuyant sur l’expérience d’autres régions qui ont optimisé son usage pour la “distribution de contenus et l’analyse de métriques”.

L’ONU suit également des essais d’utilisation de l’intelligence artificielle dans des rédactions en Argentine, Colombie, Mexique, Pérou et Paraguay, où elle est employée pour vérifier des informations, détecter des discours de haine et distinguer les vraies nouvelles des fausses.

L’IA et l’opinion publique en Amérique Latine

Avant la fin de cette année 2024, une étude menée par le centre Luminate, s’appuyant sur des données de l’Institut Ipsos, a révélé que 55 % des latino-américains soutiennent l’idée de créer des mécanismes de régulation pour l’intelligence artificielle dans toutes ses applications.

Les résultats publiés la deuxième semaine de décembre montrent que la région semble davantage consciente des risques associés à l’IA, en particulier en ce qui concerne des sujets tels que les fraudes électorales, entre autres.

Par ailleurs, 40 % des latin-américains s’inquiètent des risques que présente l’IA lors des processus électoraux, avec des préoccupations qui atteignent 52 % au Brésil, 51 % en Colombie, 47 % au Mexique et 39 % en Argentine.

Tendances pour 2025

Pour Álvaro Liuzzi, 2025 marquera des tendances d’utilisation de l’intelligence artificielle dans les médias de la région, une véritable “opportunité” pour exploiter cette technologie à bon escient.

Liuzzi identifie au moins cinq domaines dans lesquels des avancées pourraient se manifester, notamment la “création automatique de contenu multimédia” grâce à des outils d’IA capables de générer vidéos, podcasts et autres formats à partir de texte, permettant ainsi aux médias d’“élargir leur offre sans augmenter les ressources”.

Il imagine également un usage prédictif de l’IA pour analyser les tendances, aidant les médias à anticiper les sujets d’intérêt public, ce qui leur permettrait de préparer du contenu en avance sur les tendances émergentes.

Les rédactions pourraient aussi s’appuyer sur l’IA pour “vérifier des données en temps réel”, offrant la possibilité de croiser des informations provenant des réseaux sociaux et d’autres sources pour “identifier des informations incorrectes ou trompeuses”, facilitant ainsi la vérification des faits.

En outre, l’expert en médias numériques envisage la création de “nouvelles interactives” permises par l’intelligence artificielle, transformant les spectateurs de simples “consommateurs passifs de contenus” en utilisateurs interagissant directement avec l’information.

Enfin, on discerne une autre voie d’opportunité pour les médias via l’IA dans l’“intégration de données locales”, facilitant l’accès à des informations spécifiques sur la sécurité, les services et d’autres domaines.

Points à retenir

  • La présence croissante de l’intelligence artificielle dans les médias pose des défis juridiques et éthiques.
  • Les années récentes ont marqué une prise de conscience croissante des potentiels et défis de l’IA dans le journalisme.
  • Les journalistes sont appelés à maintenir des standards de qualité en utilisant l’IA pour éviter les problèmes de désinformation.
  • Les régulations sur l’IA gagnent en importance face aux inquiétudes du public concernant son utilisation.
  • Le paysage médiatique pourrait évoluer vers une intégration accrue de l’IA dans la production d’informations et l’interaction avec le public.

Cette réflexion sur les transformations apportées par l’intelligence artificielle appelle à une discussion constructive sur l’équilibre entre innovations technologiques et éthique dans le journalisme. À mesure que nous avançons, il est crucial de définir des normes qui garantissent l’intégrité et la fiabilité des informations diffusées.



  • Source image(s) : www.vozdeamerica.com
  • Source : https://www.vozdeamerica.com/a/la-ia-y-el-periodismo-en-2024-que-depara-esa-tecnologia-para-2025-en-los-medios-de-comunicacion/7903545.html


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